mardi 3 novembre 2009

Notre langue

Le jeudi 19 novembre 2009

Pour l'amour de notre langue et de notre culture, j'aimerais reprendre ici un certain nombre de termes ou de locutions fautives entendues à la radio, ou lues sur un certain nombre de sites Internet, car ces termes ou locutions reviennent régulièrement et, comme ce sont des animateurs ou des personnalités connues qui les emploient, bien des gens les imitent.

Deux poids, deux mesures

La locution deux poids, deux mesures, représente la situation normale.  Il est tout à fait naturel qu'à deux poids donnés, correspondent deux mesures.  Lorsqu'on veut dénoncer une situation injuste, il faut parler d'*Un poids, deux mesures*, ce qui signifie que pour deux êtres se trouvant dans une même situation, la direction attribue deux mesures, alors qu'en toute justice, il faudrait, au contraire, adopter deux mesures distinctes.  En d'autres mots, il y a lieu d'employer l'expression *Deux poids, deux mesures* pour parler de ce qu'il convient de faire, et *Un poids, deux mesures* pour parler d'une situation injuste.  À titre d'exemple, si deux joueurs de hockey se rendent tous deux coupables d'une mise en échec à peu près égale, mais que la Ligue nationale suspend l'un des deux joueurs tout en épargnant une suspension à l'autre joueur, il convient de décrire une telle situation comme *Un poids, deux mesures* = le même type de mise en échec se voit puni de deux manières différentes.

À défaut de saisir la nuance, mieux vaut dire, tout simplement, qu'il y a injustice.

Dix-huit ans et plus

Comme l'on ne peut avoir, à la fois, dix-huit ans et dix-neuf ans, en tous les cas où il est fait mention d'âge, relativement au droit à tel ou à tel autre avantage, privilège, prix, récompense, il faut dire, et écrire:  *Dix-huit ans ou plus*.  La SAQ, qui a pourtant les moyens de se payer les services d'excellents réviseurs, paie des messages publicitaires comportant cette locution fautive. Soixante-cinq ans OU plus, vingt-cinq ans OU plus, et ainsi de suite.

Faire en sorte que

Faire que, tout simplement.

Dénudé de

Un fil électrique peut être dénudé, une épaule peut être dénudée, mais l'on ne peut dire, ni écrire, que tel aliment est *dénudé de sel*, ce qui est dénué de sens, et non dénudé de sens.  Il suffirait de parler d'aliment *sans* sel.  Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué, il faudrait poser la question aux animateurs de radio ...

Les producteurs d'euffes du Québec

J'ai volontairement écrit ce mot tel que prononcé à la station Corus Sports CKAC 730-AM.  Lorsqu'on parle de Producteurs d'œufs du Québec, il faut prononcer *eux*, et laisser le reste du message publicitaire fournir des précisions, à savoir s'il s'agit d'un pronom personnel, au pluriel, ou de bons œufs (z'eux) de chez nous.  Toute autre prononciation donne l'air habitant au diffuseur.

Définitivement

La signification de cet adverbe est, ainsi que le mot l'indique, *de manière définitive*, et non assurément, certainement, oui, bien sûr ou effectivement.

Tout à fait

La signification de cette locution est *complètement, entièrement*, et non assurément, certainement, oui, bien sûr ou effectivement.  «Vous êtes rentré de vacances hier?» --«Tout à fait» ...  L'on voit ici le ridicule de répondre «Tout à fait», au lieu de «Oui», tout simplement, ou bien de «C'est exact».

Repartir à zéro

L'on ne repart pas à zéro, malgré la chanson d'Édith Piaf «Je ne regrette rien», mais l'on repart DE zéro.

Prendre ce médicament de trois à quatre fois par jour

Étant donné que l'on ne peut prendre un médicament trois fois et demie par jour, il faut dire et écrire «Prendre ce médicament trois OU quatre fois par jour».

Il faudra recruter trois à quatre membres de plus

Étant donné que l'on ne peut recruter trois membres et demi, il faut dire et écrire que l'on recrutera trois OU quatre membres de plus.

Lors de la saison régulière

Comme «lors» désigne un moment en particulier, par exemple lors de la remise des trophées, il faut dire et écrire, pour parler d'un moment qui dure, «au cours de».

L'opportunité

Nous nous interrogeons quant à l'opportunité d'une telle mesure, c'est-à-dire quant à son caractère opportun.  Lorsqu'il s'agit d'une occasion favorable, mieux vaut dire ou écrire saisir sa chance, sauter sur l'occasion.  Le fait qu'un terme soit plus long que d'autres ne veut pas automatiquement dire qu'il est plus recherché.

Je vais vous partager ...

«Je vais vous partager mes souvenirs de voyage ...»  Si je vous partage mes souvenirs de voyage, il est sous-entendu que je n'en garderai aucun pour moi.  Je vous ferai part de mes souvenirs de voyage, je partagerai avec vous quelques souvenirs de voyage, oui.  Si je vous partage mes bonbons, je n'en garderai pas un seul pour moi, mais si je partage avec vous mes bonbons, il m'en restera quelques-uns pour moi.  La nuance est là.  Cette locution erronée de «Je vais vous partager» pourrait provenir de l'anglais, bien que la forme anglaise soit «I will share with you», qui devrait être rendue, en français, par «Je partagerai avec vous».

Le pluriel d'expressions consacrées

Il me faudra revenir à cela, et y ajouter périodiquement, car je remarque de plus en plus d'erreurs commises lorsqu'il s'agit d'écrire certaines expressions consacrées.  La première qui me vient à l'esprit est «le match s'est terminé en tirs de barrages», où il faut laisser le mot barrage au singulier, mais je pourrais sans peine en trouver une cinquantaine d'autres, que je devrai noter au passage, pour pouvoir les commenter ici.  Un système de son, des systèmes de son, étant donné que l'usage semble avoir délaissé la locution chaîne stéréo, pourtant correcte.  Un coup de cœur, des coups de cœur, puisque chaque individu n'a qu'un seul cœur.  

J'en aurais pour des semaines si je transcrivais tout ce que l'on peut lire sur des sites Internet où des internautes rédigent des remarques à l'intention du grand public, car l'on y voit de plus en plus de mots mal écrits, supposément pour aller plus vite, ce qui impose de la fatigue au lecteur et entrave la compréhension.

Cet article sera à compléter ...

Il a bien fait

Il a bien joué, il a bien exécuté tel numéro.  Il a bien fait de nous prévenir, mais l'on ne peut dire qu'un joueur a bien fait, au sens de «il a donné un bon rendement».

Peser les pour et les contre

Calque de l'anglais.  En français, on pèse le pour et le contre.

Cela change «les donne»

Cela change la donne, tout simplement.

Publicité recommandant à la population de laver ses mains

En français, on se lave les mains, on se lave les dents, on se lave la tête, on se frotte les mains, on se savonne les mains.  La publicité en question dit lavez vos mains, lavez vos dents, etc.  Ces formes représentent des calques de l'anglais wash your hands, wash your face, etc.

J'ai encore entendu, hier, à Corus Sports, cette affaire de «deux poids, deux mesures», pour dénoncer une situation d'un poids, deux mesures. J'ai hâte que ces gens comprennent que ce qu'il faut viser est bel et bien que deux poids doivent nécessairement donner lieu à deux mesures, et qu'une situation anormale doit être dénoncée sous l'appellation d'un poids, deux mesures.  

En somme, lorsqu'on ne comprend pas le sens d'une locution, mieux vaut ouvrir le dictionnaire et vérifier, d'abord, surtout si l'on tient un micro et que l'on possède un auditoire qui pourrait répéter, à tort et à travers, les erreurs que l'on commet en ondes, qu'il s'agisse de radio ou de télévision.

Remplacer «à pied levé»

L'on fait un dessin à main levée, mais l'on remplace AU pied levé.

À 20 heures ce soir

À 20 heures aujourd'hui, étant donné que 20 heures sous-entend déjà: soir.  Si l'on désire insister, l'on peut utiliser la forme:  à 20 heures ce 9 novembre, ou à 20 heures ce lundi.

Les vrais nationalistes devraient éviter d'indiquer l'heure selon le modèle américain ou anglais canadien, d'autant plus que le modèle européen est d'une précision idéale.

Pallier à

Pallier.  Pallier l'absence de X, pallier un manque de ressources, etc.

Une septième victoire consécutive 

Une septième victoire d'affilée, une septième victoire de suite

Un article, un geste, une protestation virulent(e)

Véhément(e).  

Excessivement

Cet adverbe signifie *trop*.  Pour faire le superlatif, il convient d'employer l'adverbe *extrêmement*.

«Vingts équipes»

Vingt équipes.  La question n'est pas de savoir s'il faut faire la liaison, étant donné que, dans la locution *vingt équipes*, car vingt ne prend pas la marque du pluriel.  Truc facile à retenir:  On n'a pas tous les jours vingt ans, et non vingts ans.

La «gente»

Malgré la tendance, uniquement au Québec, depuis quelques années, à tout féminiser, alors qu'il est bien connu qu'en français, le masculin tient lieu de forme neutre, les locutions *la gent trotte-menu*, *la gent féminine*, *la gent masculine*, sont invariables.

Au tout début, à la toute fin (du match, de la réunion, etc.)

Tout au début, tout à la fin.

Ramener à l'ordre

L'on peut rétablir l'ordre, ramener l'ordre, mais dans la locution qui sous-entend une réprimande, il faut dire et écrire «rappeler à l'ordre»; l'action de rappeler quelqu'un à l'ordre s'appelle un rappel à l'ordre.

Porter à confusion

Il faut dire et écrire «prêter à confusion».

Je vous souhaite ...

Je vous souhaite bonne journée, bon anniversaire, bonnes vacances, prompt rétablissement, Joyeux Noël, Bonne année, etc.  Souhaiter une bonne journée est un calque de l'anglais et est à éviter, tout comme d'ailleurs souhaiter *un* Joyeux Noël.  L'on souhaite Joyeux Noël, tout simplement.  Truc:  l'on ne souhaite pas une bonne chance à qn, ni de la bonne chance, mais l'on souhaite bonne chance, bon succès.

Liaisons

Les liaisons font partie du bon parler français.  Nombre de messages publicitaires, soit pour suivre la mode, soit pour se donner l'air jeune, omettent les liaisons, ce qui nuit à la compréhension du message.  Billets en vente devrait se prononcer billets z'en vente, et non billet en vente. Comme les exemples ne manquent pas, je n'ai retenu que ce dernier.

Acculé au pied du mur

En termes strictement physiques, il est impossible d'être «acculé au pied du mur», à moins de n'être déjà assis par terre.  L'expression correcte est «acculé au mur», et l'on peut également être acculé à la faillite, c'est-à-dire contraint d'y recourir.  Si le fait d'être «accumulé au pied du mur» peut constituer une image plaisante, cela demeure une plaisanterie à éviter lorsqu'on tient un micro, soit à la radio, soit à la télévision.

Comme pas un

Il marque des buts comme pas un?  Non.  Comme pas deux, car la formulation «comme pas un» exclut celui-là même dont on fait l'éloge.

On compatise beaucoup ...

J'ai entendu cela de la bouche même de Michel Villeneuve, cet après-midi, sur les ondes de Corus Sports.  Quelle honte, pour un animateur de radio (et aussi de télévision) qui compte des centaines de milliers d'auditeurs qui ajoutent foi à tout ce qu'il dit et ne manqueront pas de répéter ce qu'il a dit.  Tout d'abord, même si l'on peut être à la fois compatissant, empathique et sympathique, il faut dire, et écrire:  nous compatissons, nous sympathisons.  Comme il n'existe pas de verbe empathir, ni empathiser, l'on ne peut qu'être empathique, et non empathiser.  Il eût mieux valu pour Michel Villeneuve de dire «On compatit», car la compassion est la compassion et se passe d'adverbe de quantité.  

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